Les 20 et 21 février 2025, la (Conférence Internationale des Barreaux) CIB était à Libreville, à l’occasion des évènements de la rentrée du barreau du Gabon. Le Barreau du Gabon avait accueilli en 2021, le 35e congrès annuel de la CIB où était présent, le barreau du Liban, représenté par le Bâtonnier Melhem Kallaf qui, dans un discours empreint d’émotion, nous alertait sur la gravité de la situation du Liban dont les derniers développements lui ont empêché d’être parmi nous, lors des précédents congrès et lors de cette rentrée.
À l’occasion de la rentrée du barreau du Gabon, la CIB et le barreau ont organisé conjointement un colloque sur « Les rôles de l’Avocat dans la cité ». Une manifestation scientifique qui s’inscrivait dans le cadre de la deuxième journée, laquelle avait été précédée par une journée de consultation gratuite pour favoriser l’accès à la justice.
Le colloque a été inauguré par la Présidente de la CIB, Madame la Bâtonnière Murielle Renar-Legrand, Bâtonnière du barreau de Martinique et par le Bâtonnier du barreau du Gabon, Monsieur le Bâtonnier Raymond Obame Sima.
Leurs discours introductifs qui rappelaient l’importance de la coopération internationale de nos barreaux ont été suivis par un premier panel qui abordait la question de la protection par l’avocat de l’égalité des droits, sur le thème, « une même justice pour tous » qui portait plus précisément sur le principe de l’égalité des armes. Les panélistes, la Bâtonnière Renar-Legrand et Maître Farafina Boussou Mie-Mbine ont évoqué plusieurs aspects mettant en valeur la pratique professionnelle de l’avocat dans les prétoires qu’il s’agisse des Caraïbes et plus concrètement de la Martinique, ou de l’Afrique centrale avec l’expérience gabonaise. Elles ont porté plus particulièrement sur diverses problématiques, telles que la durée de la détention provisoire dénoncée par les avocats, comme une peine préalable à tout jugement, qui débouche parfois sur des acquittements ou des condamnations égales à la durée de la détention préalable au jugement. Ces pratiques sont assimilables à une justification à posteriori. Les questions soulevées par leurs interventions ont donné lieu à des discussions sur la relation entre les avocats et les magistrats ainsi que la place de l’Avocat dans le prétoire.
Un deuxième panel était animé par le Bâtonnier Bernard Vatier et Maître Francis Nkea. Il portait sur « la lutte contre l’impunité » avec notamment les infractions de corruption et les infractions économiques et financières. Les panélistes ont insisté sur le fait que la lutte contre l’impunité est essentielle pour le respect de l’état de droit. Par ailleurs, elle l’est également pour la protection des droits des investisseurs, comme l’a rappelé par la suite le Bâtonnier Bilé-Aka dans le cadre de son intervention sur les partenariats public-privés. Le Bâtonnier Vatier a insisté sur le fait que l’impunité est elle-même criminogène, il soulignait que la lutte contre l’impunité est le pilier de la justice. Le principe d’une même justice pour tous constitue la base de la sécurité juridique nécessaire aux investissements et à un environnement économique sain d’une part. D’autre part, il constitue le fondement de la paix sociale.
Le Procureur général Eddie Narcisse Minang, est ensuite intervenu sur le nécessaire respect des droits fondamentaux par la justice et leur garantie devant la justice. La discussion qui a suivi mis en valeur l’importance des Cours régionales grâce au recours individuel et à ses effets, mais également de la protection des droits fondamentaux par le premier juge.
La dernière table ronde portait sur « l’Avocat lanceur d’alerte », à travers les différents dispositifs mis en place dans certains États et sur le rôle des acteurs de la société civile et du défenseur des droits qui assistent les lanceurs d’alerte. L’intervention de Jimmy Kande et celle de Dominique Tricaud ont été complémentaires et enrichies de cas concrets qui révèlent l’importance du rôle de lanceur d’alerte et du rôle des avocats pour les protéger.
Les travaux ont été suivis avec la plus vive attention par de très nombreux participants et se sont achevés par un moment grandiose, grâce au talent de tous les candidats qui ont participé à la finale du concours d’éloquence. Sept jeunes avocates et avocat sont intervenus sur plusieurs thèmes en associant leur culture juridique et philosophique à l’histoire du Gabon dans le contexte des enjeux sociétaux auxquels les avocats sont partis prenants comme en témoignent les sujets « l’indépendance est-elle hors de prix? » et « l’avocat doit-il s’engager en politique pour défendre la justice ? ».
Le lendemain, la CIB était conviée à la cérémonie de rentrée en présence de plusieurs représentants du Gouvernement de l’État du Gabon, dont le Vice-premier ministre, le Ministre de la Justice, les représentants de la magistrature, les représentants du corps diplomatique. Les anciens bâtonniers entouraient le Bâtonnier et les avocats du barreau du Gabon qui ont pris place un à un dans un moment solennel. De nombreux avocats d’Afrique centrale et d’Afrique de l’ouest étaient présents.
Une particularité de cette rentrée est qu’elle marquait les 30 ans du jumelage du barreau du Gabon et du barreau de Lyon. Le Bâtonnier de Lyon, Monsieur Alban Pousset-Bougère et de la Vice-Bâtonnière Sara Kebir sont venus spécialement pour cette occasion et pour renforcer leur partenariat déjà riche avec le barreau du Gabon.
Le Bâtonnier Raymond Obame Sima a prononcé un discours courageux, mettant en avant les dysfonctionnements du système judiciaire et les difficultés rencontrées dans les relations entre le barreau et les institutions de la République du Gabon. La rentrée fut également l’occasion pour le Président de l’Union des avocats d’Afrique centrale, le Bâtonnier Patrice Monthe de prendre la parole pour rappeler le rôle essentiel de la profession d’avocat lorsque les démocraties vacillent. Le bâtonnier de Lyon a pu décrire l’importance des liens de coopération entre son barreau et le barreau du Gabon dans le cadre de la convention de jumelage qui les rassemble à travers les nombreux projets et bénéfices mutuels qui en ressortent. Enfin, le Secrétaire général de la CIB qui avait été invité à prendre la parole a pu rappeler l’importance du rôle de l’Avocat dans la Cité en cette période où l’état de droit est particulièrement volatile dans le monde moderne et où les avocats ont un rôle majeur à jouer pour le voir préservé.
À l’issue de ces évènements sur : « Les rôles de l’Avocat dans la Cité », les barreaux représentés par leurs Bâtonniers et les avocats présents, conscients de la situation en République Démocratique du Congo ont décidé de lancer l’Appel de Libreville pour la paix.